Cameca est une entreprise en pleine activité de nos jours mais elle a connu des années glorieuses à Courbevoie.
Baptisée au départ Radio-Cinéma, elle est issue de la Compagnie générale de la télégraphie sans fil (CSF), ancêtre de Thalès et voit le jour en 1929 à Levallois. Elle produit des projecteurs assez puissants pour les salles de cinéma – comme le Gaumont-Palace à Paris – qui connaissent un développement fulgurant à l’époque.
Radio-Cinéma prend son essor à Courbevoie, 35 rue Armand Silvestre où s’implante son usine alors qu’elle dispose de bureaux 22 boulevard de la Paix.
Après guerre, la société entreprend la fabrication d’instruments destinés aux laboratoires scientifiques et développe une gamme d’appareils sophistiqués.
En 1954, elle devient Cameca (Compagnie des Applications Mécaniques et Electroniques au Cinéma et à l’Atomistique) et vient s’installer 103, boulevard Saint-Denis à Courbevoie. Elle y restera jusqu’en 2006 avant de déménager à Gennevilliers.

En 1954, elle devient Cameca (Compagnie des Applications Mécaniques et Electroniques au Cinéma et à l’Atomistique) et vient s’installer 103, boulevard Saint-Denis à Courbevoie en 1956. Elle y restera jusqu’en 2006 avant de déménager à Gennevilliers.
Si sa production de projecteurs pour le cinéma s’achève au début des années 60, Cameca va connaître une décennie prodigieuse en laissant sa griffe sur un phénomène populaire: le Scopitone.
Le Panoram, son ancêtre est développé dans les années 1940 aux États-Unis par la Mills Novelty Company, de Chicago. Il peut projeter un petit film musical 16 mm. Les rois du jazz, comme Duke Ellingtony tiennent un rôle majeur.
A cette époque où on trouve des juke-box dans de nombreux cafés, l’idée d’adjoindre des petits films aux disques choisis par les clients suscitent un grand intérêt en Italie et en France.
Frédéric Mathieu, le directeur technique de Cameca, rachète des brevets et imposent son modèle dans toute la France mais également dans d’autres pays européens et… aux Etats-Unis.
Cameca présente son premier modèle, le ST16, à la Foire de Paris en mai 1960.
Sorti en 1963, le ST36 peut projeter 21 films à l’heure, ce qui est important pour permettre au cafetier d’amortir un matériel qui coûte cher. En 1961, pour un nouveau franc, le client peut projeter une vidéo de sa vedette préférée sur un écran de 54cm. Toute la galaxie yéyé y figurait: Johnny Hallyday, Sylvie Vartan, Sheila, Claude François, mais aussi Jacques Brel ou des comiques comme Guy Bedos ou Fernand Raynaud.
Le nom de l’appareil en vient à désigner les vidéos. Des réalisateurs talentueux comme Alexandre Tarta, Jean-Christophe Averty ou Claude Lelouch vont produire des centaines de « scopitones ». La plupart d’entre eux sont tournés à l’économie dans les studios Eclair d’Epinay-sur-Seine.
Cameca profite de l’aubaine jusqu’à ce que le Scopitone passe de mode quelques années plus tard, miné par les droits d’auteur et le coût de l’appareil pour les cafetiers. Dès 1968, l’usine du boulevard Saint-Denis en aurait cessé sa production.
Aux Etats-Unis, le marché est gangréné par le racket de la mafia et la société qui l’exploite fait faillite en 1969.
Les scopitones des années 60 vont connaitre une renaissance vingt ans plus tard avec l’apparition des clips vidéo.
Le Scopitone mérite sa place au Panthéon de la culture populaire, il a même droit à une série télé, Scopitone is not dead.
Pendant ce temps-là à Cameca, les profits du Scopitone ont permis à l’entreprise d’investir dans le domaine scientifique, son autre cœur de métier et elle devient spécialiste de SIMS (spectrométrie de masse des ions secondaires), des appareils mesurant la composition élémentaire, isotopique ou moléculaire d’éléments analysés, des appareils vitaux pour l’industrie des semi-conducteurs. Ses autres spécialités sont la tomographie et les microsondes, très loin du cinéma et des scopitones.
Sources:
Remerciements à Emmanuel de Chambost, ingénieur, ancien de Cameca ainsi que son historien, qui m’a communiqué ce diaporama ainsi que son livre: Histoire de Cameca (1954-2009); beaucoup d’autres informations peuvent être trouvées sur son site: https://siteedc.edechambost.net/, en particulier cette histoire de Cameca pendant la seconde guerre mondiale.