Jours de gloire à Bécon

rugby à Courbevoie

A la toute fin du XIXe siècle, le rugby français faisait ses grands débuts.

Porté par les élèves des lycées parisiens, ce nouveau sport inventé à Rugby en Angleterre voyait la naissance de deux grands clubs parisiens : le Racing-Club de France (RCF) fondé par les élèves de Condorcet et le Stade français fondé par ceux de Janson de Sailly.

Leur rivalité est toujours d’actualité.

Si la finale du premier championnat de France se déroula à Bagatelle en 1892 quand le Racing-Club de France remporta son premier titre en dominant le Stade français 4-3 (l’essai valait trois points à l’époque et les coups de pied au but étaient comptés différemment), les deux finales suivantes eurent pour cadre Bécon-les Bruyères.

Le stade de Bécon n’avait pas grand-chose d’un stade proprement dit, il ne comprenait pas de tribune et d’après les comptes-rendus de l’époque n’était même pas plat, disons qu’il s’agissait d’une grande pelouse.

Il fut ensuite aménagé et rebaptisé Stade Dubonnet puisqu’il se trouvait bordé par l’avenue du même nom d’un côté et par la rue Ulbach de l’autre.

C’est là que le 19 mai 1893, le Stade Français prit sa revanche sur son rival 7-3, puis réussit le doublé l’année suivante en battant18-0 l’équipe de Nos.

Bécon était donc le temple du rugby à l’époque des pionniers.

A noter que les deux finales suivantes ne quittèrent pas pour autant Courbevoie puisqu’elles eurent lieu au Vélodrome de Courbevoie qui devint plus tard le Cynodrome et aujourd’hui le Stade Jean-Pierre Rives.

Plus mémorable encore, une rencontre véritablement historique eut lieu sur le terrain de Bécon-les-Bruyères le 26 mars 1894.

Ce jour-là, une équipe de rugby française, en l’occurrence le Stade français, battit pour la première fois une équipe britannique, le club londonien de Rosslyn Park.

Le compte-rendu du match rédigé par Jules Marcadet et publié dans Le Magazine pittoresque est un modèle du genre et décrit par le menu les retournements de situation qui ont émaillé le match culminant dans l’essai victorieux obtenu dans les dernières minutes par « M. Arnaud, qui, par une superbe course évitant et repoussant tour à tour ses adversaires, traverse tout le terrain et arrive dans le camp anglais parer le ballon juste au moment où il était rejoint. »

Bien sûr, l’écho en fut relativement faible à l’époque, seuls les pratiquants et amateurs célébrèrent ce succès ainsi qu’une partie de la presse sportive qui afficha une satisfaction très mesurée pour une certain nombre de bonnes raisons.

En premier lieu, l’adversaire en question n’était pas la meilleure équipe d’Angleterre. Ensuite, cette courte victoire obtenue in extremis ne rattrapait pas complètement les raclées précédentes.

Néanmoins, outre le plaisir séculaire de battre les Anglais, les motifs de satisfaction ne manquaient pas. Il n’avait fallu que deux ans aux jeunes universitaires français (dont la moyenne d’âge tournait autour de vingt ans) pour réaliser cet exploit contre des adversaires plus expérimentés et on avait bon espoir qu’avec du travail et de la persévérance, les équipes françaises pourraient un jour lutter d’égal à égal.

En conclusion, il s’agit donc d’un événement qui mériterait presque une commémoration nationale…

Sources: Illustrations et presse – Gallica – BNF

Photos Zulimo Chiesi – Gallica – BNF