Ariès et ABG automobiles : la saga Petiet

Dans l’industrie automobile, la marque Ariès occupe une place à part : découvrez l’histoire de son fondateur le baron Charles Petiet et l’installation de l’entreprise à Courbevoie.

Charles Petiet

Charles Petiet en 1919
Charles Petiet en 1919

À l’aube du XXe siècle, l’automobile est encore un rêve lointain pour beaucoup. Pour Charles Petiet, jeune ingénieur diplômé de l’École centrale des arts et manufactures de Paris, ce rêve est déjà une réalité concrète.

En 1903, à seulement 22 ans, il fonde la Société des Automobiles Ariès, une entreprise visionnaire qui allait profondément transformer le secteur automobile. Ce projet novateur fait suite à la présentation de son mémoire de fin d’études, intitulé « Une usine de construction automobile », qui illustre son engagement précoce et sa vision pour l’avenir de l’industrie.

Jusqu’à la fin de sa carrière, Charles Petiet restera une figure centrale de l’industrie automobile française. Président du Salon de l’Automobile de Paris jusqu’en 1958, il continuera d’influencer l’évolution du secteur.

Les premiers pas d’Ariès : l’usine de Villeneuve-la-Garenne

Charles Petiet donne le coup d’envoi de son projet à Villeneuve-la-Garenne en avril 1903. Il baptise son entreprise « Ariès » (Bélier), son signe astrologique en latin. Ce choix symbolique évoque la puissance, l’agilité et la robustesse, des qualités intrinsèques au bélier, et reflète les attributs que la société aspire à transmettre à ses véhicules.

Les débuts de l’entreprise sont marqués par des modèles à la fois solides et innovants. Parmi les premières voitures produites, l’Ariès 12/14 HP (type B), lancée en 1904, se distingue par sa fiabilité et ses performances remarquables.

La robustesse des premiers véhicules de la marque est démontrée par une performance impressionnante : un tour de France de 5 000 km réalisé au volant d’une Ariès 12/14 HP (type B) sans la moindre panne. Cet exploit atteste de la solidité et de la fiabilité exceptionnelles des voitures Ariès.

La voiture de tourisme Ariès 12-15 HP Victorieuse du Concours de Ville, le 22 décembre 1905 à Paris

L’essor des premiers modèles

Au début de son aventure, Ariès présente une gamme complète de véhicules, allant du modèle 8/10 HP (type C) bicylindres au modèle 30/35 HP (type F) à quatre cylindres. Rapidement, les anciens modèles sont perfectionnés, tandis que de nouveaux modèles apparaissent. La marque lance les types G (18/22 HP et 30/35 HP) et I (12/15 HP, puis 18/22 HP) et remporte plusieurs compétitions majeures pour voitures de tourisme, renforçant ainsi sa réputation.

Modèle 30 HP décapotable

Les débuts dans la compétition automobile

Ariès commercialise son modèle luxueux 50 HP, doté d’une cylindrée de 12 litres, et introduit la série des 20/30 HP (type P). En parallèle, la marque fait ses premières incursions dans le monde des courses automobiles. À bord d’un modèle de la série O, Edmond Borde relie Paris à Madrid en 48 heures, démontrant ainsi la robustesse des voitures populaires. La même année, Ariès conçoit sa première voiture de course, bien que les résultats en compétition restent encore modestes.

Innovation et diversification

Ariès remporte plusieurs victoires avec sa voiturette VT monocylindre, mais Charles Petiet décide de suspendre temporairement la participation aux courses. Parallèlement, la marque se concentre sur les véhicules utilitaires et militaires, introduisant des modèles innovants tels que la 6 HP (type B) et des camions à benne basculante.

Ariès se distingue également en lançant le premier moteur français à six cylindres en V, tout en proposant des modèles comme la 8/10 HP (type V) à quatre cylindres.

Développement militaire et succès industriel

La marque se distingue lors du Tour de France automobile, tandis qu’un nouveau camion de moyen tonnage fait son apparition. Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, Ariès se mobilise pour l’effort de guerre, fabriquant plus de 3 000 camions ainsi que des moteurs d’avions.

Nouvelle 15 HP Ariès
Ariès – CC4

Courbevoie, nouveau fief industriel d’Ariès

L’aventure industrielle d’Ariès ne se limite pas aux premiers succès de Villeneuve-la-Garenne. Après la Première Guerre mondiale, Charles Petiet comprend la nécessité de moderniser ses installations pour relever les défis de l’après-guerre. La ville de Courbevoie, avec son emplacement stratégique proche de Paris, se révèle être le nouvel ancrage idéal pour l’entreprise.

En 1920, Ariès déménage dans une nouvelle usine au 40 rue de Normandie sur un site de près de 42 000m² qui s’étend jusqu’au 27 avenue Marceau.

Ce déménagement marque un tournant décisif dans l’histoire de la marque. La proximité de Courbevoie avec Paris et ses infrastructures locales favorisent le développement et la production de l’entreprise. Courbevoie devient ainsi le centre névralgique où se concrétisent les innovations automobiles qui feront la renommée d’Ariès dans les années suivantes.

Les défis des années 1920

Après la guerre, la production reprend avec des modèles tels que la « Nouvelle 15 HP Ariès » et le CC4. Les ingénieurs développent également des voitures de course, dont la « Grand Sport », qui se distingue dans les compétitions internationales. Ariès participe aux 24 Heures du Mans, où une panne mécanique vient interrompre une performance prometteuse.

Dans le domaine des utilitaires, Ariès doit faire face à une concurrence croissante, notamment de la part de Berliet et Renault. L’entreprise simplifie son catalogue avec des modèles comme la 9-40 et la Super 10-50, qui se distinguent par leurs innovations techniques.

Cependant, la crise économique freine l’expansion de la marque, et malgré les efforts de Charles Petiet pour créer une coalition de constructeurs, Ariès cesse sa production après plus de trois décennies d’existence et environ 20 000 véhicules produits.

Ariès – tableau de bord – Super 10/50 C2 1936
Ariès – intérieur – Super 10/50 C2 1936
Ariès Super 10/50 C2 1936

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une ère d’innovations et de compétitions : L’âge d’or

L’usine de Courbevoie permet à Ariès de diversifier sa production et de se développer. En 1925, Ariès lance le modèle Grand Prix, une voiture de course conçue pour rivaliser avec les meilleures automobiles européennes. Le modèle Ariès 6 Cylindres, introduit en 1926, se distingue par ses performances exceptionnelles et son confort.

Ariès s’impose dans les compétitions automobiles, accumulant des victoires prestigieuses telles que la Coupe Boillot en 1927 et les 24 Heures de Belgique en 1928.

Les voitures fabriquées à Courbevoie se distinguent par leur élégance et leurs performances, rivalisant avec celles des Rolls-Royce britanniques. Parallèlement, Ariès continue d’innover avec des véhicules utilitaires.

En 1929, la société présente le premier camion à benne basculante, une innovation majeure pour l’époque.

Les infrastructures de Courbevoie offrent un cadre propice à cette expansion, permettant à la société d’explorer de nouveaux marchés, tant pour les véhicules de tourisme que pour les poids lourds.

Un crépuscule pour Ariès, mais un héritage durable pour Courbevoie

Malgré ces succès, les années 1930 s’avèrent plus difficiles. La crise économique mondiale fragilise l’industrie automobile, et Ariès ne fait pas exception. Charles Petiet, fidèle à ses principes, refuse toute fusion avec de grands groupes, préférant mettre un terme à l’aventure en 1938. Il justifie sa décision par une phrase célèbre : « Mieux vaut mourir que se mésallier. »

Bien que la production automobile d’Ariès prenne fin, l’héritage de l’entreprise et son lien avec Courbevoie perdurent. La ville a joué un rôle crucial en offrant à Ariès un cadre industriel propice à son expansion et à ses innovations. Aujourd’hui, même si l’usine a disparu, l’histoire d’Ariès fait partie intégrante du patrimoine de Courbevoie.

Le début de l’aventure ABG : la fusion des sociétés Ariès, La Bougie BG et SFEDR

Le 12 mai 1943, en pleine Seconde Guerre mondiale, la Société A.B.G. est constituée pour rassembler des savoir-faire complémentaires dans un contexte industriel perturbé. Cette nouvelle entité regroupe diverses activités industrielles liées à l’automobile, incluant la production de bougies d’allumage sous la marque BG et la mise en place de la SFEDR (Société de Fabrication d’Engrenages à Denture Rectifiée).

Cette fusion joue un rôle crucial dans la structuration de l’entreprise, consolidant les différentes branches sous une même entité pour optimiser les synergies et favoriser l’innovation. La société ABG cessera ses activités en 1959, alors que sa branche cyclomoteurs VAP poursuivra jusqu’en 1967.

  • La Bougie B.G. se distingue dans la fabrication de bougies d’allumage, essentielles pour les moteurs à combustion interne. En partageant le même site industriel qu’Ariès, l’entreprise optimise sa production pour répondre aux besoins des secteurs automobile, industriel et aéronautique, grâce à son savoir-faire en pièces moteur.

  • La SFEDR, spécialisée dans les engrenages de haute précision, est également située à Courbevoie, sur le même site que les autres sociétés. Cette proximité géographique favorise une synergie unique, renforçant l’efficacité de la production et facilitant le partage des infrastructures. Les engrenages produits sont cruciaux pour les systèmes de transmission dans des secteurs exigeants.
  • La Société anonyme ABG s’est également imposée comme le leader incontesté des moteurs auxiliaires, tout en étant l’un des plus grands fabricants de cyclomoteurs en France, de l’après-Seconde Guerre mondiale jusqu’en 1967. En concurrence directe avec la Mobylette de Motobécane et le Vélosolex, ABG s’est illustrée par son savoir-faire aéronautique, ses moteurs VAP renommés à travers l’Europe, ainsi que ses moteurs auxiliaires qui ont marqué l’industrie.
VAP 602/ photo Classicardinal

 

Auteur : Florent Savi-Bideaux

Sources:

Gallica/ BNF

https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Petiet

[2] https://fr.wikipedia.org/wiki/Ari%C3%A8s_(entreprise)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ari%C3%A8s_(entreprise)#/media/Fichier:La_voiture_de_tourisme_Ari%C3%A8s_12-15_hp_victorieuse_du_Concours_de_Ville,_le_22_d%C3%A9cembre_1905_%C3%A0_Paris.jpg

http://www.antiqbrocdelatour.com/Les-collections/voitures-anciennes-doc/-photos-originales-voitures-ancien-p1-27.html#google_vignette

[5] https://de.wikipedia.org/wiki/Datei:Aries_15_HP.jpg

[6] http://www.antiqbrocdelatour.com/Les-collections/voitures-anciennes/Aries%20CC4-4,%20voiture%20routi%C3%A8re%20de%201937-id2495.html#google_vignette

https://www.osenat.com/lot/149913/24965115-aries-super-10-50-c2-1936-le-chant-du-cygne-chassis